
Le recrutement est un défi d’autant plus crucial à relever aujourd’hui que les besoins, nés de la dernière reprise d’activité, s’ajoutent aux besoins concernant les métiers traditionnellement en pénurie : rectifieurs, tourneurs, cuisiniers, soudeurs, chauffeurs routiers, … et aux besoins nés des évolutions technologiques et de la révolution numérique.
De plus, la population active évolue dans son rapport au travail et dans le même temps, un trop grand nombre de personnes sont toujours privées d’emploi.
Dans ce contexte, la question des compétences se révèle stratégique dans un environnement professionnel où l’exigence de compétitivité fait de la qualité, un impératif.
Enfin, le pouvoir d’attractivité des entreprises est devenu d’autant plus important que demain, le lien qui unira les entreprises et ses ressources humaines ne sera pas forcément sous forme de contrat de travail mais avec de nouvelles formes de subordination.
L’Aract Auvergne Rhône-Alpes souhaite apporter sa contribution à la réflexion.
Les métiers évoluent, les carrières professionnelles ne sont plus linéaires et écrites d’avance, les formes d’emploi se diversifient comme le temps partagé ou l’auto-entrepreneuriat. Les espaces de co-working font réseau et connaissent une forte progression, accueillant auto-entrepreneurs, salariés en télétravail… Tous ces éléments concourent à observer une évolution de l’organisation du travail et des parcours professionnels. Dans ce cadre, se définir par un métier ne fait plus vraiment sens. Ce qui semble faire la différence, ce sont les qualités personnelles liées à la motivation, la polyvalence, les capacités relationnelles, l’autonomie. On parle plus volontiers d’approche compétences que Pôle Emploi intègre, dorénavant, dans ses grilles.
Les politiques en faveur de la formation professionnelle se sont multipliées. Elles ont longtemps été perçues comme le principal levier de lutte contre le chômage puisqu’elles sont censées réduire les difficultés de recrutement liées à l’inadéquation entre offre et demande de compétences sur le marché du travail.
L’analyse de France Stratégie « Renforcer la capacité des entreprises à recruter » parue en août 2017, faisant le lien entre modes de gestion de la main-d’œuvre, difficultés de recrutement rencontrées par les entreprises et impact de la formation sur l’accès et le retour à l’emploi, modifie considérablement le regard porté sur les politiques de formation développées ces dernières années.
L’adéquation entre formation et poste à pouvoir n’est plus le principal critère de recrutement des entreprises. Le diplôme reste important mais est, pour certains, seulement significatif d’un potentiel, d’une « capacitation » : 46% des entreprises font de la formation leur 1e critère de sélection, contre 60% pour l’expérience professionnelle ou 64% pour des compétences transversales comme la polyvalence ou la capacité d’adaptation (Etude Pôle Emploi 2016).
Les employeurs expriment souvent leurs attentes avec des termes génériques : motivation, autonomie, capacité d’initiative… notions difficilement objectivables. Ils cherchent, avant tout, à évaluer le « potentiel » d’un candidat, c’est-à-dire leurs capacités à s’adapter aux différentes situations et aux évolutions possibles de l’activité. Cette notion de potentiel est subjective et diffère d’un employeur à un autre.
Si les entreprises valorisent les qualités telles que l’expérience, la polyvalence ou la capacité d’adaptation, c’est aussi parce qu’elles ont du mal à mettre en œuvre une réelle gestion des compétences. D’après le Centre d'études et de recherches sur les qualifications (CEREQ), elles sont moins de 15% à le faire et ce sont essentiellement de grandes entreprises.
Les PME/PMI recrute souvent dans l’urgence : lorsqu’un salarié part, les entreprises cherchent à remplacer à profil équivalent et/ou à se projeter dans le profil du candidat qu’elles jugeraient « idéal ». C’est ce que l’on nomme parfois « le mouton à 5 pattes ». Pour être certain que le candidat choisi fera l’affaire, le recruteur a tendance à exiger un profil surévalué au regard du poste à pourvoir.
L’Aract (et notamment Aravis) s’est intéressée au sujet depuis les années 2000. L’accent était mis sur le volet de l’insertion en lien avec l’intégration en entreprise. Nous affirmions notre positionnement de la nécessaire complémentarité entre travail et emploi.
Notre approche se concentrait sur les thématiques conditions de travail en articulation avec les conditions d’emploi. Cette approche demeure en s’enrichissant de celle de la Qualité de Vie au Travail.
La thématique « difficultés de recrutement » a toujours été en toile de fond de toutes nos interventions, dès lors que nous sommes en entreprise. Depuis peu, elle peut y devenir centrale.
Trois de nos axes de travail peuvent en témoigner plus particulièrement :
- La mixité ou l’approche « genre » est trop souvent une solution promue pour répondre aux difficultés de recrutement. L’embauche de femmes reste une solution recherchée dans des métiers, plutôt à Bas Niveau de Qualification, pour pallier les difficultés de recrutement.
- L’approche territoriale ou l’accompagnement de projets territoriaux (ex : GPEC.T ou mise en place de plateforme de mobilité inter-entreprises ou appui au dialogue social territorial. Les intermédiaires de l’emploi développent des prouesses de combinaison de dispositifs d’insertion pour placer à l’emploi, les intérimaires ou les demandeurs d’emploi. Les entreprises cherchent, aujourd’hui, à innover pour lever individuellement ou collectivement leurs problématiques RH.
- L’usure professionnelle ou/et le maintien en emploi concernent tant des seniors qui font toujours la même tâche et qui ne se hasardent pas à quitter leur emploi (question de maintien dans l’emploi et d’adaptations des parcours) que des plus jeunes à qui, on avait promis des évolutions qui tardent à venir et qui finissent par aller voir ailleurs.
A l’issue de notre première exploration sur le thème des difficultés de recrutement, l’Aract organise ses réflexions autour de 3 axes de travail basés sur l’attractivité. Celle des entreprises, celle des métiers, mais aussi celle des territoires qui semblent trois échelles complémentaires et interdépendantes. Ils n’ont pas vocation à tout résoudre mais ont le mérite de guider les acteurs locaux.
