Uguet Urbanothérapeute (La Motte-Servolex)
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Le bureau Uguet, implanté en Savoie et Haute Savoie depuis maintenant 43 ans, est une société de conseil en ingénierie urbaine d’aménagement, transport, voirie et architecture paysagère pour le compte de collectivités territoriales ou de promoteurs immobiliers.

Dans le cadre du projet partenarial « Passage, entreprises en transition » - qui explore les liens entre écologie et travail, nous avons recueilli le témoignage d’Adrien Uguet, qui en reprenant l’entreprise fondée par son père, y a développé un fonctionnement reposant sur des valeurs humanistes fortes : respect, confiance et esprit d’équipe.

Vous parlez de votre entreprise en tant qu’« Urbanothérapeute », qu'est-ce c'est ?

Le terme "Urbanothérapeute" est une invention personnelle. C'est une façon de se différencier sur le marché.
"Urbano" parce que notre métier se rattache à l'aménagement des villes.
"Thérapeute" parce que j'ai à cœur de prendre soin de mes collaborateurs qui, eux-mêmes, prendront soins de leurs clients.
En effet, je considère que les salariés du Bureau Uguet sont "mes clients", ceux à qui je dois rendre service, pour qu’eux-mêmes rendent service aux clients du Bureau Uguet.

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De plus, dans notre métier, on recherche le confort d'usage. Quand on se sent bien quelque part, on ne s'en rend pas forcément compte alors que quand ça ne va pas, là cela nous saute aux yeux.
Pour illustrer notre travail je peux prendre l'exemple d'un malvoyant qui traverse un passage piéton. Généralement, on met un potelet en plein milieu du passage pour éviter que les voitures ne s’y garent.
Or, un malvoyant ne va pas le voir et risque de s’y cogner.

L’idée c’est donc de trouver une solution alternative : en mettre deux en laissant le passage central libre.
On obtient le même résultat pour les voitures en conservant le confort d'utilisation pour tous, y compris les malvoyants.

Nos clients sont des élus, des gens qui sont soucieux de faire les bons choix. Nous les accompagnons dans leur décision, ce qui constitue une dimension humaine forte.
Rassurer, c’est important ! Finalement je définirais notre activité par la phrase suivante : "un maître d'œuvre qui pense la ville pour et par l'Humain, qui accompagne ceux qui font l'espace urbain et garantit le confort d'usage de ce qui le vive".

“ Les collègues s'organisent entre eux en respectant un cadre donné. Cela donne véritablement du sens, du plaisir, de l’engagement au travail. ”

Comment faites-vous le lien entre les questions environnementales et de Qualité de Vie au travail ?

Je crois beaucoup dans les compétences humaines.

Dans les fondamentaux de l'entreprise libérée, on cherche à tirer le meilleur des collaborateurs pour qu’ils puissent s’épanouir. Quand on fait ça, on s'aperçoit qu'on obtient 15% de productivité de plus.

Lorsque j'ai racheté le bureau de mon père, j'avais en tête un mode de management très tayloriste avec un chef sachant. Mais j’ai très vite changé de paradigme et me suis dit qu’en réalité, c’est peut-être finalement celui qui fait qui est celui qui sait.
Dans cette perspective, on fait confiance aux gens et on peut leur laisser pleinement l’initiative.

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C’est ainsi que j’ai imaginé pour mon entreprise, un organigramme qui ressemble à une cellule du vivant : il y a des liaisons entre le noyau et ses autres composants mais il y a aussi des liaisons entre les composants eux-mêmes qui ne passent pas forcément par le noyau. Les collègues s'organisent entre eux en respectant un cadre donné. Cela donne véritablement du sens, du plaisir, de l’engagement au travail.

Comment je sais que ça marche bien ? Il suffit de regarder la facturation et je m'y retrouve (rires).

J'ai mis 4 ans à mettre en place un système où tous puissent se sentir en confiance. C'est un processus long qui nécessite un vrai engagement et de la motivation – autant d’intentions qui ne se décrètent pas, elles doivent donc être réelles et bien ancrées.

L'engagement environnemental est beaucoup plus récent pour mon entreprise. En septembre 2019, nous sommes entrés dans un programme animé par le Centre International de Ressources et d’Innovation pour le Développement Durable (CIRIDD) dénommé « Relief » et qui nous permet de travailler la question de l’économie circulaire dans l’offre que nous proposons.
J’ai également un engagement au sein du Centre des Jeunes Dirigeants (CJD) via le programme « Impact » qui, comme son nom l’indique, initie des réflexions sur la réduction de l'impact des entreprises sur l'environnement.

Quand on construit une maison c'est 300 m3 de terre – soit 30 camions qui circulent pour aller l’évacuer. Comment faire pour limiter l’impact de ce transport de terre ? Quand on installe de la lumière en ville, quel impact sur les animaux ? Voilà le genre de questions que l'on doit se poser dans mon métier.
Il faut réfléchir à un confort pour l'Humain et également pour les animaux et les végétaux. Réfléchir à un compromis, quelque chose de raisonné et de raisonnable. Comment prendre soin de l'environnement en continuant à améliorer notre confort ?
En allant vers de la délégation de compétences dans mon entreprise, vers l'autonomie laissée à mes salariés, cela me laisse du temps pour m'intéresser à d'autres sujets comme celui de l'environnement.

“ Il faut réfléchir à un confort pour l'Humain et également pour les animaux et les végétaux. Réfléchir à un compromis, quelque chose de raisonné et de raisonnable. ”

Comment s'est opérée la bascule ?

Je suis entré par la porte de la Qualité de Vie au Travail.
En effet, vouloir sans cesse être dans le contrôle comme j’en avais l’habitude, c’est usant. Cela est allé tellement loin que j'ai fait un grave burn-out. Je ne pouvais pas continuer comme ça.
Alors je me suis inscrit au CJD qui m'a aidé à voir qu'il y avait d'autres façons de faire, d'autres manières de manager.
J'ai donc commencé à déléguer des choses, à réfléchir à ce que je voulais faire de mon cabinet.  Il m’a fallu comprendre que nous avons tous des forces et des faiblesses et que ces dernières ne sont pas une tare. Au final il s'agit plus d'une transition qu'une bascule car cela m'aura pris 1 an.

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En ce qui concerne la question environnementale, j'ai bénéficié d'informations régulières via mon entourage qui est déjà très sensibilisé sur ce sujet.
Et puis je suis allé à une journée d’informations sur le programme « Impact » en janvier 2020 proposée par le CJD – et je dois dire que cela m’a un peu secoué. J'ai eu une grosse prise de conscience sur l’impact que pouvait avoir mon entreprise sur l'environnement.
C’est pourquoi désormais, je cherche à le réduire, tout en ayant conscience qu’en tant que dirigeant, cela va également concerner de près mes salariés.

Nous avons donc commencé à mettre en place quelques actions comme, par exemple : mieux entretenir les voitures pour les garder le plus longtemps possible, la mise en place d'une prime de déplacement en vélo, l’installation de panneaux photovoltaïques sur nos bureaux…

Et… quelle est la prochaine étape dans cet engagement ?

C'est LA question ! J'ai commencé par les choses les plus simples, celles qui pouvaient se mettre en place rapidement.

Aujourd'hui je n'ai pas la réponse. Je sais qu'il faut que je retravaille sur l'offre de mon entreprise pour agir directement sur le cœur de notre activité.

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Par ailleurs, j'ai l'impression que la société française est globalement encore en retard sur le sujet… je trouve que beaucoup de personnes sont toujours sur des questions de base comme le tri ou le recyclage alors qu’il conviendrait d’aller beaucoup plus loin.

Dans le livre "Le bug humain" Sébastien Bolher explique que les humains sont mus par 5 choses de base : se reproduire, se nourrir, connaître son environnement, économiser son énergie et se positionner dans la hiérarchie. Peut-être qu’on ne pourra pas changer cette façon de penser mais que l’on peut tout de même changer les paradigmes.
On pourrait imaginer que si diminuer notre impact sur l'environnement nous positionnait mieux dans la hiérarchie alors que cela deviendrait essentiel pour l'humain…

Est-ce que vos salariés adhèrent à cette façon de penser ?

Oui de manière générale même si j’essuie parfois quelques moqueries, et que cet engagement est peut-être un peu perçu comme « une lubie du patron » … Mais je pense qu’ils sont réellement très attentifs à voir ce que cela pourra leur apporter comme satisfaction personnelle d’avoir un Vrai impact sur notre Environnement. Pour l'instant cela impacte peu leur activité de travail….

Alors est-ce que l'étape d'après, ça ne serait pas justement d'intégrer les collaborateurs à la réflexion ?

Je reste persuadé qu’il en va de ma responsabilité que de faire avancer ces sujets mais je ne souhaite pas pour autant que les salariés les subissent. Je pense que cela va modifier les habitudes mais que cela ne changera pas fondamentalement leur travail. Cela n’impacte pas le fond de notre métier mais il est nécessaire de s’y atteler. Je vois ça comme une « nécessité douce » en quelques sortes…

 

Interview réalisé en juin 2020, par Eliette Darnaud, chargée de mission à l’Aract Auvergne-Rhône-Alpes dans le cadre des partenariats noués pour le projet « Passages - entreprises en transitions »

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Sur le projet passage

Béatrice Baudo, chargée de mission
04 37 65 49 95 - 06 24 55 02 06 - b.baudo@anact.fr
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